mercredi 31 août 2022

Jeunes corneilles noires du Jardin des Plantes: biométrie et ADN révèlent une majorité de femelles

Corneille noire 083 'entretenant' une pelouse.
La corneille noire (Corvus corone) est un corvidé très commun en Europe qui affectionne les milieux agricoles, mais également les zones urbaines et périurbaines. Elle s’est bien adaptée aux villes, où elle trouve de la nourriture en quantité. En effet, cet oiseau omnivore et opportuniste s’accommode parfaitement des aliments présents dans les poubelles et bénéficie des restes de pique-niques dans les parcs.

Depuis une trentaine d’années, le nombre de corneilles noires a augmenté dans Paris, de manière concomitante à la modification de gestion des poubelles publiques suite à plusieurs séries d’attentats dans la capitale. Il a été suggéré que les corneilles trouvaient dès lors un accès plus aisé aux restes de nourriture jetés dans ces poubelles, devenues de simples sacs en plastique transparent. Ces corvidés se rassemblent parfois en grands groupes dans les parcs urbains, pouvant compter jusqu’à plusieurs centaines d’individus. Il s’agit majoritairement de rassemblements d’immatures, pouvant alors causer des nuisances plus visibles par exemple vider les poubelles, arracher les parterres de fleurs ou les pelouses, à la recherche de vers ou de larves d’insectes. C’est pourquoi, depuis juillet 2015, et sous l’impulsion de la Mairie de paris, un programme de capture et de marquage de corneilles a été mis en place par Frédéric Jiguet (Centre d'Ecologie et des Sciences de la Conservation, programme personnel n°883) sur les sites du Jardin des Plantes et du Jardin des Tuileries (Paris; voir post précédent). Chaque oiseau est marqué avec deux bagues de couleur identiques portant un code individuel gravé, qui permet à des observateurs d’identifier les oiseaux et de signaler leurs observations sur une plateforme internet dédiée (www.corneilles-paris.fr). Plus de 560 individus ont été bagués en 4 ans, qui ont donné lieu à plus de 10000 observations visuelles par presque 100 observateurs différents. Le but de ce programme est d’étudier les déplacements et la survie des corneilles capturées à Paris, afin de comprendre pourquoi les mesures de régulation locales ne sont pas efficaces, et de trouver des méthodes pour limiter les nuisances. C'est l'objet de la thèse de doctorat de Perrine Lequitte-Charransol (CESCO): 'Cohabiter avec les corneilles : nuisances et adaptations' (financée par la Région Ile-de-France, 2020-2023).

La corneille noire ne présente pas de dimorphisme sexuel. Or, le sexe est une variable importante à prendre en compte pour étudier la dispersion d’une espèce. C’est pourquoi, les individus capturés de 2016 à 2021 ont été mesurés (longueur et hauteur du bec, longueur de l’aile pliée et longueur du tarse), pour constituer une base de données morphométriques. Des plumes ont été prélevées pour réaliser une extraction d’ADN servant à déterminer le sexe des oiseaux. Le résultat du sexage moléculaire a été croisé avec ces données morphométriques afin de trouver une combinaison de variables permettant de prédire le sexe des corneilles. La fonction trouvée a permis de prédire le sexe de 105 corneilles de première année, capturées de 2016 à 2021, avec 88% de réussite. Cette fonction, appliquée à 542 corneilles de première année capturées pendant la même période, a montré les femelles étaient plus nombreuses que les mâles parmi les corneilles capturées au jardin des plantes. Ceci pourrait indiquer que les corneilles femelles sont plus nombreuses que les mâles au Jardin des Plantes... ou qu’elles sont plus susceptibles d’entrer dans la cage de capture !

Pour en savoir plus, lisez l'article:

Lequitte-Charransol, P., Saux, E., & Jiguet, F. (2022). Sexing first-calendar-year Carrion Crows Corvus corone from biometrics reveals variation between years in post-fledging sex ratio. Ringing & Migration, 1–9. DOI: 10.1080/03078698.2022.2098369

Rédaction: Perrine Lequitte-Charransol

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