lundi 9 décembre 2019

Recommandations d'hygiène pour le nourrissage des oiseaux des jardins

Mésange noire contrôlée à une mangeoire en Belgique (M. Spies)


Le nourrissage artificiel des animaux améliore probablement leur survie à l’hiver, de par leur meilleure condition et/ou la réduction des risques associés à la recherche de nourriture (dépense énergétique, prédation ; Plummer et al. 2019). Par contre, cela augmente la promiscuité (car beaucoup d’individus s’alimentent au même endroit) et cela augmente les contacts entre espèces qui normalement ne se rencontrent pas ou peu. Cette forte promiscuité intra- et inter-spécifique augmente le risque d’épidémie. Nous présentons ici 6 règles d’hygiène simples pour l’usage des mangeoires dans le cadre des suivis d'oiseaux par baguage. Ces règles ont été définies par Anouck Decors du Réseau de surveillance épidémiologique de l’ONCFS et Philippe Gourlay du Centre Vétérinaire de la Faune Sauvage et des Ecosystèmes (voir le communiqué de presse ONCFS/Muséum/CVFSE-ONIRIS/ADILVA 2019; ou le livret du Garden Bird Health Initiative, 2005, pour une version détaillée). Elles sont valables pour prévenir l’apparition de maladie infectieuse autour d’un poste de nourrissage, qu’elle soit d’origine bactérienne, virale, parasitaire ou fongique.

Quand nourrir ?

1- Uniquement en hiver. Lors du réchauffement printanier (et en été), les oiseaux en ont moins besoin, et le risque de prolifération de pathogènes (bactéries, champignons) est maximal du fait des températures et humidité croissantes. De fait, le nombre de signalements de mortalité anormale de verdiers à des mangeoires culmine au printemps (ONCFS et al. 2019).


Comment nourrir sainement ?

2- Utiliser une nourriture saine, sans pathogène. Pour ça, l’entreposer au sec, à l’abri des moisissures, des rongeurs, et des oiseaux domestiques (p. ex. poules, pigeons). Ne pas donner de nourriture moisie.

3- Utiliser un distributeur qui reste sain. Pour ça, préférer les mangeoires suspendues, et éviter les mangeoires plateaux. Ne pas nourrir à même le sol. Préférer les mangeoires en plastique, dont le nettoyage est plus efficace.
Le nourrissage au sol est à éviter car les pathogènes contenus dans les fientes, ou sur les pattes des oiseaux, peuvent proliférer dans le sol et contaminer les oiseaux ultérieurement. Et des moisissures peuvent se développer sur la nourriture non-consommée.


4- Utiliser plusieurs points de nourrissage, éloignés, différents pour chaque type d’aliment, et les changer régulièrement d’emplacement. Cela réduit la concentration d’individus sur une même mangeoire, et la rencontre entre des espèces qui normalement ne se fréquentent pas, ou peu. Le déplacement des mangeoires réduit l’accumulation de germes sous les mangeoires.

5- Ajuster la quantité distribuée pour que la nourriture soit consommée dans les 2 jours.

Comment bien nettoyer les mangeoires ?

6- Retirer la nourriture non-consommée et les fientes ; laver au savon avec une brosse ; rincer abondamment ; puis appliquer une solution désinfectante (p. ex. eau de javel diluée à 5%, Virkon HD, THA ND) et rincer ; laisser sécher avant de remplir de nourriture. Idéalement, faire un nettoyage chaque semaine. Pour vous protéger pendant le nettoyage, portez des gants de ménage.

7- Si vous utilisez des abreuvoirs, appliquez les mêmes précautions, mais avec un nettoyage si possible chaque jour.

Que faire si vous constatez des mortalités anormales d'oiseaux à votre mangeoire ?
Stopper le nourrissage et l'abreuvement afin de réduire les risques de transmission d'agents infectieux aux oiseaux en bonne santé. Signaler ces mortalités anormales au réseau SAGIR.

Des recommandations d'hygiène similaires sont diffusées par l'Observatoire des Oiseaux des Jardins (Ligue de Protection des Oiseaux et Muséum National d'Histoire Naturelle).

Quelles preuves a-t'on de risques épidémiques aux mangeoires ?
Retenons deux maladies d'apparition récente parmi les oiseaux des jardins en France:
  • La trichomonose. Cette maladie touche les fringilles, en particulier le Verdier d'Europe et le Pinson des arbres (Lawson et al. 2018). Apparue récemment en France (Gourlay et al. 2011), elle a donné lieu à des mortalités anormales localisées (Chavatte et al. 2019, ONCFS et al. 2019). Au Royaume-Uni, ce pathogène a contribué au déclin récent des populations de verdier (Robinson et al. 2010, Lawson et al. 2018). De fait, les régions françaises où des mortalités anormales de verdiers ont été signalées en 2018 et 2019, avec des cas avérés de trichomonose (Hauts de France, Normandie, Bretagne), correspondent aux régions où viennent hiverner des verdiers anglo-saxons.
Répartition hivernale (déc. à févr.) en France des verdiers d’Europe bagués en période de reproduction (avr. à juin) au Royaume-Uni (Dehorter & CRBPO 2019)

Références
Rédacteur: Pierre-Yves Henry

2 commentaires:

  1. Alors que nous sommes en mai, sur le site Oiseaux de france ont voit encore des photos de mésanges nourries avec des boules: Il faudrait demander à leurs auteurs de cesser de donner de la nourriture aux oiseaux même si je comprends bien le plaisir simple de voir le manège des oiseaux autour d'une mangeoire.

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  2. Ne devait-on pas arrêter d'acheter des boules de graisse ? De vraies poubelles...

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