lundi 19 octobre 2020

Dernières reprise remarquables



 Sélection de quelques contrôles/reprises remarquables arrivés au CRBPO au cours                       du printemps/été 2020.



Quelques circonstances de reprises inhabituelles :

un mâle adulte d'Epervier Accipier nisus trouvé le 22/05/2020 dans un verger à Chateauneuf sur isère (26) fortement englué...sur une bande adhésive servant à détecter la présence d’insecte avant traitement ! Le rapace n'a pas survécu, bagué sur la même commune en Aout 2016.

Oie cendrée baguée poussin en 2003 au Marquenterre (80) retrouvée fraîchement morte avec une aile cassée sous une éolienne le 27/01/2020 à Bernay en Ponthieu (80), circonstance de découverte encore peu habituelle en France pour cette espèce, l'âge de l'oiseau (18 ans) et son origine ( population nicheuse anciennement introduite >preuve de sédentarité) sont également à relever. 

Quelques records septentrionaux : 

 Grive musicienne Turdus philomelos trouvée morte le 22/07/2020 à Lerresfjord, compté de Finnmark sur la côte de la Laponie Norvégienne à la limite nord de répartition de l'espèce. Grive baguée le 20/10/2018 au Fort Vert, Marck (62) env 2427 km de distance. A l'exception de 2 données du compté voisin de Troms toujours en Norvège, toutes les reprises de Fennoscandie proviennent de régions situées à plus de 300 km au Sud.

09/2015 St Froult (17) (c)Pierre Rousseau


Pigeon ramier Columba palumbus bagué poussin en Juin 2019 à Rovaniemi en Finlande à la limite du cercle arctique, palombe prélevée le 25/11/2019 dans les Landes (40) env 3015 km de distance. La photo ci dessous à été prise par le bagueur finlandais lors du marquage de cet individu !

 Quelques autres données plus anciennes de ramiers bagués dans cette ville existent dans la base.

Juin/2019 Rovaniemi-Finlande (c)Veikko Isomursu
 


Autres données intéressantes :

Capture accidentelle dans un filet de pêche d'un Plongeon catmarin Gavia stellata porteur d'une bague britannique le 25/04/2020 en baie de Douarnenez (29), marqué poussin le 22/07/2019 sur l'île de Hoy dans l'archipel des Orcades au Nord de l'Ecosse. Les reprises de plongeons restent rares : moins de 30 pour cette espèce en France.

Cas intéressant de dispersion pour une Ouette d'Egypte Alopochen aegyptiaca issu d'une population férale, jeune oiseau bagué le 01/07/2019 à Ludwigsburg près de Stutgart/Allemagne et reprise à 371 km  plus à l'Ouest dans la vallée de la Marne sur la commune d'Athis (51). Une nouvelle preuve de la capacité de déplacement des populations introduites de cet anatidé considéré comme"espèces exotiques envahissantes" par les pouvoirs publics.

Ouette marquée dans un parc urbain hollandais (c)Dirk Raes Cr Birding


Reprise d'une Barge rousse française à une centaine de km à l'est de l'Oural tiré le 17/05/2020 dans la région de Khanty-Mansi/Russie asiatique,  bagué mâle de première année  le 06/11/2010 dans la réserve naturelle de Moeze (17) et régulièrement observé en hivernage dans la zone grâce à sa combinaison de bagues de couleurs, env 4260 km de distance. Individu probablement en route vers ses site de nidification arctique, il s'agit seulement de la seconde donnée de reprise de bague française en Siberie pour ce limicole mais les suivis par balises ont permis d'apporter des connaissances plus précises à ce sujet ces dernières années...  

Reprise d'un Chevalier aboyeur Tringa nebularia  , bagué sur son site d'hivernage africain en Guinée-Bissau en décembre 2018, porteur d'une bague émise par le centre portugais et tiré en Aout 2019 en baie de l'Orne (14), une des rares données récentes en lien avec Afrique de l'Ouest  pour ce chevalier et la première avec ce pays.

Reprise le 17/06/2020 d'un Engoulevent d'Europe Caprimulgus europaeus porteur d'une bague espagnole percuté par une voiture sur une route du Causse Méjean (48), bagué 1A le 24/09/2019 sur la côte catalane à Mataro/Espagne. Il s'agit de la première donnée entre notre pays et la péninsule ibérique pour cette espèce dont les reprises demeurent rares.

09/2015, Vielle-Tursan(40) (c) Romain Provost

A signaler également  le record de longévité national battu pour cette espèce (dont les contrôles ne sont guère  abondants) : un mâle âgé d'au moins 8 ans recapturé le 20/06/2020 sur le site de l'ENS de la Vallée du Canut à Lassy (35) dans le cadre du protocole STOC capture, bagué au même endroit adulte en 2013. Il s'agirait du seconde record européen, max de minimum 11 ans d'après la liste d'Euring  https://euring.org/data-and-codes/longevity-list

Contrôle le 18 Mars dernier d'une Mésange charbonnière Parus major près de Varsovie dans l'Est de la Pologne, femelle de deuxième année civile baguée le 14/02/2020 dans le parc du MNHN de Brunoy (91) env 1388 km de distance. Il s'agit de la donnée la plus orientale de la base à cette latitude pour cette espèce depuis 2000, des données historiques existent cependant jusqu'en Russie européenne (région de Moscou) et dans le nord de l'Ukraine.

11/2014, jardin des plantes/Paris(75) (c)Romain Provost


Troisième données françaises ( précédents contrôles en 2017 et 2018) de Fauvette babillarde Sylvia curruca  portant une bague israélienne : individu découvert le 08/07/2020 sur une route de la commune de Robersart (59), baguée le 18/02/2018 dans le désert du Négev/Israel à env 3358 km de distance. A ces données il faut ajouter un contrôle français en 2012 en Israël ainsi qu'une reprise de 2008 en Palestine et voilà résumé toutes les données françaises de cette fauvette au Moyen-Orient sur cette voie de migration réputée être emprunté chaque année par les babillardes européennes.

Première reprise documentant la région d'hivernage d'une Hypolaïs polyglotte Hippolais polyglotta français ! Individu porteur d'une bague émise par le centre de baguage de Cape Town en Afrique du Sud trouvé mort suite à une collision contre une baie vitrée le 28/06/2020 à la Boissière des Landes (85), bagué le 13/01/2020 à Tanji en Gambie (env 3950 km de distance). Il s'agit de la région d'hivernage attendue pour ce migrateur transsaharien dont la répartition hivernale est restreinte à l'Afrique occidentale. Les rares reprises de cette fauvette ne dépassaient pas l'Afrique du Nord jusqu’à présent dans le base.

Capture d'un Chardonneret élégant Carduelis carduelis porteur d'une bague française en décembre 2019 sur la côte occidentale du Maroc près de Safi, bagué en Janvier 2019 à Bergouey (40) env 1450 km de distance. Il s'agit seulement de la troisième données de reprise de chardonneret français en Afrique du Nord, la dernière en 1976  également pour un individu bagué dans les Landes !

L'oiseau en question vraisemblablement capturé illégalement pour être gardé en captivité...  


Rédacteur: Romain Provost


jeudi 20 août 2020

Du renfort pour la saisie des archives historiques de reprises d'oiseaux bagués: arrivée de Carole Leray

Une part importante des données historiques (1909-1990) d’oiseaux bagués et retrouvés ultérieurement est encore sous format papier. Khaldia Akkari et Marielle Péroz (CRBPO) travaillent depuis 5 ans à l’encodage et l’informatisation de ces données. A ce jour, il reste encore 60000 données non saisies. Grâce à un soutien exceptionnel de la part de la Direction des Ressources Humaines du Muséum, Carole Leray rejoindra le CRBPO pour 6 mois à partir du 1er septembre 2020. Sa mission sera de contribuer à la finalisation de cette saisie des données historiques de reprises d'oiseaux bagués.

Carole a effectué un BTS Gestion et Protection de la Nature puis une licence pro Analyses et Techniques d'Inventaire de la Biodiversité à l'Université de Lyon 1. Elle a effectué son stage de fin d'étude au Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive (Montpellier) sur le suivi de la reproduction de la Mésange bleue en Corse. Par la suite elle a rejoint l'équipe "Ecologie de la santé" de la Tour du Valat (Camargue) sur le suivi des tiques et du plastique dans une colonie de Goéland leucophée. Elle a également suivi la reproduction des spatules blanches baguées en Camargue. Elle a été aide-bagueuse dans différents camps de baguage, et elle a suivi la formation théorique du CRBPO.

Bienvenue Carole !

Rédacteurs: Carole Leray et Pierre-Yves Henry

vendredi 14 août 2020

Plumes vagabondes, un témoignage sur l'émotion du suivi des oiseaux migrateurs par le baguage

Pierre Witt a publié récemment un bel article témoignant avec justesse de l'émotion que cela procure de participer à l'étude des oiseaux migrateurs en les capturant, les inspectant et les marquant. Ce reportage, paru dans Terre Sauvage n°374 (Mars 2020), a été réalisé au camp de suivi de la migration par baguage de Marcenay, à la frontière entre la Côte-d'Or et l'Aube, dans la roselière d'un étang perdu au milieu du plateau calcaire du Châtillonnais. Ce suivi est réalisé tous les mois d'août depuis 2009 par la Ligue de la Protection des Oiseaux de Côte-d'Or et Sâone-et-Loire. Il repose sur la mise en œuvre du protocole d'étude de la halte migratoire (dit SEJOUR) des fauvettes paludicoles et des buissons, et des hirondelles et bergeronnettes utilisant la roselière comme dortoir.
Pierre Witt nous a accompagné pendant quelque jours, et en a tiré ce bel article auquel vous pouvez accéder en cliquant sur ce lien, en allant à la page 50 (Texte et photographies © Pierre Witt pour Terre Sauvage).

Rédacteur: Pierre Durlet

Nouvelle thèse: Démographie multispécifique des passereaux communs en France

Le projet ANR DEMOCOM (Effets de la gestion et du climat sur la dynamique des communautés - Développement d'une démographie multi-espèce, cf. post dédié) a pour objectif d’améliorer la compréhension des processus démographiques responsables des dynamiques d'assemblage d'espèces en réponse aux fluctuations climatiques. C’est dans le cadre de ce projet que la thèse de Maud QUEROUE a démarré en Octobre 2018 sous la direction d’Olivier Gimenez (Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive), de Pierre-Yves Henry (CRBPO-MECADEV/CESCO) et de Christophe Barbraud (Centre d’Etudes Biologiques de Chizé). L’objectif de cette thèse est de développer des modèles de population multi-espèces pour comprendre les rôles respectifs de l’environnement et des interactions interspécifiques sur la dynamique des populations.

Après avoir étudié des systèmes proies-prédateurs d’oiseaux marins, le projet de thèse se concentre maintenant sur la recherche de signes démographiques de la compétition entre espèces chez différents systèmes de passereaux communs. Un premier système composé de la mésange charbonnière (Parus major) et de la mésange bleue (Cyanistes caeruleus) va permettre d'explorer l’effet la compétition pour les sites de reproduction et les ressources selon le type d’habitat et en fonction des fluctuations météorologiques annuelles. Un autre système composé de la fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla, espèce résidente ou migratrice à courte distance) et de la fauvette des jardins (Sylvia borin, espèce migratrice à longue distance) va permettre d’étudier l’effet des fluctuations météorologiques annuelles sur la compétition pour les ressources au travers d'un chevauchement plus moins important des périodes de reproduction de ces deux espèces. Enfin, sur la base de la validation de l’approche employée, les analyses pourront être étendues à l'exploration des effets des forçages climatiques sur la démographie des communautés des passereaux les plus communs de France. 

L'originalité méthodologique est d'analyser simultanément les données de plusieurs espèces, et provenant de différents protocoles. Ainsi, nous combinerons les données du Suivi Temporel des Oiseaux Communs par points d’écoute - qui renseigne sur les fluctuations de taille des populations, et les données du du Suivi Temporel des Oiseaux Communs par Capture - qui renseigne sur les changements des processus démographiques sous-jacents (survie locale, productivité, recrutement). C’est en modélisant conjointement ces deux sources d’informations que les effets de la compétition et de l’environnement sur la dynamique de ces passereaux pourront être estimés.

Rédactrice: Maud Queroue

 ANR-16-CE2-0007

 

 


vendredi 7 août 2020

Les isotopes stables ne révèlent pas de changement d'origine latitudinale des pinsons du Nord hivernant en France

Femelle de premier hiver de Pinson du Nord (A. Audevard)

Chaque année, des milliers voire des millions de pinsons du Nord hivernent en France. En Finlande comme en Suède, l'espèce est en fort déclin, probablement en raison du changement climatique. Nous pourrions donc nous attendre à ce que les populations les plus méridionales se réduisent comme peau de chagrin, et que les plus nordiques se maintiennent mieux. Comme les concentrations en deutérium (isotope stable de l'hydrogène) ont une forte structuration latitudinale en Europe, et se retrouvent dans les plumes des oiseaux, nous nous attendrions à trouver une tendance à la diminution du deutérium dans les plumes de pinson du Nord hivernant chez nous, si leur origine est de plus en plus nordique.

En 1969, une équipe du CRBPO s'était déplacée sur un gigantesque dortoir de pinsons du Nord dans le Sud-Ouest, et y avait capturé quelques centaines de pinsons, prélevant une plume de la queue (rectrice) sur 100 mâles et sur 100 femelles. Ces plumes ont été conservées au CRBPO, et ont permis de fournir un échantillon de départ pour des analyses isotopiques historiques. Les oiseaux des collections du Muséum National d'Histoire Naturelle ont fourni d'autres plumes. Enfin, les bagueurs du CRBPO ont été mis à contribution durant quelques hivers récents, pour échantillonner des oiseaux visitant leur mangeoire, ou rejoignant un immense dortoir de millions d'oiseaux en Alsace. Les résultats de ces analyses viennent d'être publiés récemment (Jiguet et al. 2020).

Il en résulte que les concentrations en deutérium (d2Hf, voir figure ci-dessous) n'ont pas varié durant plus d'un siècle et demi dans les plumes de pinsons du Nord hivernant en France. L'hypothèse la plus vraisemblable est donc que les régions d'origine de ces hivernants sont des bastions qui n'ont pas glissé latitudinalement dans le temps.


Concentration en deutérium des rectrices de pinsons du Nord au cours du temps

Pour en savoir plus, lisez l'article complet:

Jiguet, F., Kardynal, K.J. & Hobson, K.A. (2020). Feather stable isotope (δ2H) measurements suggest no historical variation in latitudinal origin of migrants in two declining songbirds. Journal of Ornithology.

Rédacteur: Frédéric Jiguet (à contacter pour obtenir un exemplaire de l'article)

lundi 6 juillet 2020

Pour une réelle évaluation des stratégies de gestion des "nuisibles"

Chaque année, en Europe, des millions de renards, mustélidés et corvidés sont détruits, considérés comme nuisibles ("susceptibles de causer des dégâts" en France) aux intérêts économiques et sanitaires de l'humain. Pourtant, dans un article récent, Frédéric Jiguet (2020) nous rappelle que les destructions dé-confinent les individus et augmentent la propagation des zoonoses. Différents résultats scientifiques illustrent cette aberration, que ce soit pour le renard et l'échinococcose alvéolaire, le blaireau et la tuberculose bovine. Pour les corvidés et les dégâts agricoles, les programmes personnels de marquage en cours en France, sur grands corbeaux, corneilles noires et choucas des tours, permettent d'illustrer les immenses échelles spatiales de fonctionnement des méta-populations, rendant toute régulation locale inefficace: un individu éliminé sera très rapidement remplacé par un autre tant que la ressource attirant l'espèce est présente.
La réflexion exposée dans cet article argumente l'évidence de la nécessité d'une réelle évaluation des stratégies de régulation de ces espèces, en plusieurs étapes pratiques, et basée sur une évaluation dite des trois E : écologique, économique et éthique.
In fine, la décision d'avoir recours à des méthodes létales devrait être systématiquement conditionnée sur le fait que les objectifs soient atteignables (réduction de dégâts, de risques sanitaires), et associés à des bilans écologiques et économiques positifs.



Renard roux et grands corbeaux, en Estonie (photo Remo Savisaar)

mardi 23 juin 2020

Une nouvelle espèce de mouche-plate pour la France métropolitaine: le Pupipare des faucons

Ornithophila gestroi (Photo: J.-D. Chapelin-Viscardi,

Laboratoire d’Echo-Entomologie)
Rassurez-vous, je ne me suis pas trompé de blog et vous non plus !

PUPIPO - le programme de science participative dédié à l’étude des Diptères pupipares hématophages parasites des oiseaux, des chauves-souris et autres mammifères - a permis d’encore enrichir la liste de l’entomofaune française d’une nouvelle espèce. Il s’agit du pupipare des faucons Ornithophila gestroi (Rondani, 1878). Onze spécimens ont été récoltés en 2018 par Philippe Pilard, de la LPO Mission Rapaces, sur des poussins faucons crécerellettes dans les départements des Bouches-du-Rhône et de l’Aude. Avant cette découverte, ce diptère était connu, au plus près, en Espagne et en Grèce, notamment sur cette espèce-hôte.

Vous retrouverez cette information ainsi que bien d’autres dans la Mouche-Plate n°6, la lettre d’informations du programme PUPIPO (parue le 14 avril 2020).

Bonne lecture.

Rédacteur: Gilles Le Guillou