mardi 20 avril 2021

Saisie des données historiques de baguage: où en en sommes-nous ?

Les données de baguage, contrôle et reprise d'oiseaux porteurs de bagues françaises comme étrangères sont toutes informatisées dans la base de données du CRBPO depuis l'an 2000. Un gigantesque chantier attendait donc l'équipe avec la nécessité pressante d'informatiser les millions de données historiques (de 1900 à 2000) conservées sous format papier dans nos archives !


Classeurs de données de baguage rangés par type et n°de bagues



L'opportunité de saisir ces données a débuté en 2015 lorsque le CRBPO s'est vu attribuer deux postes d'agents de saisie à temps plein pour ce travail de longue haleine, réalisé sans interruption par nos collègues du Muséum Marielle Peroz et Khaldia Akkari.

Leur première mission (2015-2017) aura été la saisie de l'ensemble des donnée historiques de baguage, contrôle et reprise de grands turdidés (merles et grives) avec le renfort de personnels de l'OFB, en anticipation d'un projet de thèse de doctorat sur les changements de stratégie migratoire de ces espèces gibier (voir le post dédié). Ce sont ainsi 220 000 données de baguage, 23 000 données de reprise (oiseaux trouvés morts) et 6360 données de contrôles (oiseaux recapturés vivants) de Turdus qui ont été informatisées ! 

Est venu ensuite (2018) le projet de saisir une grande partie des données de baguage des oiseaux marqués avec les bagues de préfixe G et F. Ces bagues sont utilisées pour marquer plusieurs espèces chassables, qui font l'objet de programme de suivis actuels, et pour lesquelles il fallait mettre les données à disposition dès que possible, afin d'assurer la meilleure expertise possible sur l'évolution du statut migratoire de ces espèces: cailles, grands limicoles (courlis, barges), sarcelles, tourterelles. Cela correspond à la saisie de plusieurs dizaines de milliers de données de baguage, dont une grande partie a été traitée de manière entièrement bénévole par notre collègue bagueur Bernard Chanchus.

Plus spécifiquement pour les espèces visées cela représente, en nombre de données de baguage : environ 10 300 vanneaux huppés, 500 pluviers dorés, plus de 3000 chevaliers gambettes, 1500 barges, 1000 courlis corlieu, 6500 sarcelles d'été (marquées principalement en Afrique), 1000 tourterelles turques, 4200 tourterelles des bois (en Afrique pour beaucoup), 4000 cailles des blés ....!

Depuis 2019, Khaldia et Marielle se sont focalisées sur la saisie de l’ensemble des données de contrôle et reprise pour toutes les espèces, y compris les étrangères. Ce chantier à été jugé  prioritaire en vue des futures parutions des atlas français et européens sur les migrations (prévus pour 2022).

Pour les aider dans cette mission ambitieuse, le Muséum nous a fait la faveur en 2020 d'affecter 6 mois de CDD sur cette mission, ce qui nous a permis d'accueillir Carole Leray au sein de l'équipe. Elle aura réalisé sa mission avec succès malgré les restrictions liées à la crise sanitaire Covid. Son départ récent est l'occasion de faire un point sur le travail accompli et sur ce qu'il reste à faire.

La quasi totalité des données de reprise historique est à ce jour intégrée à la base de donnée nationale, ce qui représente plus de 100 700 fiches (une fiche = une donnée de baguage associée à une ou plusieurs données de contrôle/reprise), soit environ 1 250 jours de travail !

Il ne reste plus que 7 espèces dont les quelques 21 570 fiches seront saisies au cours de 2021: Cigogne blanche, Héron cendré, Flamant rose, Grand cormoran, Goéland argenté, Mouette rieuse et Étourneau sansonnet. 

PS:  La saisie de la totalité de ces fiches de reprises historiques archivées au CRBPO a été finie le 21/01/2022.

Exemple de tiroir contenant des fiches de reprises étrangères classées par espèces et dates


Pour rappel, toutes ces données informatisées peuvent être explorées au travers de l'interface CRBPOData, laquelle est mise à jour chaque mois.

Un grand merci à Marielle, Khaldia, Carole, Bernard, aux collègues de l'OFB et toutes les personnes qui ont participé à ce travail parfois rébarbatif et bien plus complexe que vous ne pouvez l'imaginer (difficulté de relecture, faute de frappe ou données imprécises, noms vernaculaires d'espèces qui changent avec le temps, difficulté à retrouver certaines localités sans coordonnées géographiques, changement de noms voir de pays pour certaines localités étrangères, en particulier avant la première guerre mondiale ou dans les anciennes colonies françaises en Afrique ...).

Cependant il reste encore beaucoup à faire: 11 500 000 données de "baguage seul" (c'est à dire n'ayant pas donné lieu à une ré-observation de l'individu) restent à informatiser, afin de les rendre disponible pour la recherche et l'expertise, et ainsi valoriser le travail de terrain accompli par les centaines de bagueurs du siècle passé et par nos prédécesseurs du Centre de Recherches sur la Migration des Mammifères et des Oiseaux (CRMMO) ! En saisie manuelle, cela représenterait 60 ans de saisie pour une seule personne... D'autres méthodes plus efficaces vont être explorées ! La saisie de ces données est très importante afin de disposer des grands totaux de baguage, information indispensable pour révéler les changements démographiques, biométriques, et d'occurrence sur le très long terme (en particulier pour les espèces dont l'aire de répartition s'est aujourd'hui considérablement morcelée, telles que le bruant ortolan, les pie-grièches, la linotte à bec jaune ... , ou dans le cas d'espèces communes ayant fortement décliné, telles que le bruant des roseaux, le moineau friquet, ...).


Un exemple de page manuscrite de données de baguage historique  (1953) (remarquer les noms d'espèces usités à l'époque : rouge queue de muraille, bergeronnette hochequeue !)

Rédacteur : Romain Provost en charge de la coordination de la saisie d'archive