dimanche 7 juin 2020

Analyse des données de baguage de la station du Massereau 2007-2019



Les Réserves de Chasse et de Faune Sauvage du Massereau et du Migron sont situées au cœur de l’estuaire de la Loire, zone remarquable de halte migratoire des passereaux paludicoles. Le suivi de la migration postnuptiale de ces oiseaux y est pratiqué par baguage depuis 1994 au Massereau et 2011 au Migron. Ce rapport vise à étudier ces données du 1er au 31 août sur la période de 2007 à 2019 afin de répondre à plusieurs objectifs : i) évaluer l’utilisation de la réserve du Massereau par les passereaux paludicoles migrateurs sur la période de 2007 à 2019, ii) comparer ces résultats avec ceux de l’étude réalisée par Caillat et al. (2005) sur la période 1994-2003, iii) comparer les stations du Massereau et du Migron en termes de capacité d’accueil des passereaux paludicoles en halte migratoire et enfin iv) réaliser un focus sur le Phragmite aquatique.
La station du Massereau comptabilise 77 espèces baguées et 39 755 captures entre 2007 et 2019. Les effectifs ne montrent pas de tendance sur la majorité des espèces, exceptée la Fauvette des jardins (S. borin), les adultes de Gorgebleue à miroir (L. svecica) et ceux de la Locustelle luscinioïde (L. luscinioides) en augmentation. La phénologie ne montre pas de changement de dates médianes de passage sur cette période. La comparaison des résultats avec l’étude menée par Caillat et al. (2005) sur la période de 1994 à 2003 indique une stabilité des effectifs du Phragmite des joncs (A. schoenobaenus), une augmentation des effectifs de la Rousserolle turdoïde (A. arundinaceus) et une diminution des effectifs de la Rousserolle effarvatte (A. scirpaceus) et du Bruant des roseaux (E. schoeniclus).
La durée de halte migratoire moyenne de la Rousserolle effarvatte au Massereau (8,6 jours [6,8 - 10,5]) et son taux d’engraissement nul sont cohérents avec la stratégie de migration de l’espèce à cette latitude. Cependant, le Phragmite des joncs semble effectuer une durée de halte plus courte (4,2 jours [3,7 – 4,8]) et un taux d’engraissement plus faible (jeunes 0,12 g.jour-1 ± 0,01 ; adultes 0,18 g.jour-1 ± 0,02) que ceux attendus au vu de sa stratégie de refueling à cette latitude. Une étude menée sur le site du Migron en 1976 indiquait un taux d’engraissement des jeunes Phragmites des joncs nettement supérieur (0,42 g.jour-1 ± 0,07). Bien qu’il soit difficile d’expliquer cette différence, une baisse de la qualité du milieu (nourriture disponible) sur les dernières décennies est une hypothèse à approfondir. Les 3 années de la station du Migron présentent des premiers résultats encourageants avec un taux d’engraissement du Phragmite des joncs supérieur à celui du Massereau. De plus, l’année 2019 a permis de mettre en évidence l’intérêt de la scirpaie pour le Phragmite aquatique (A. paludicola). Cependant, il est nécessaire de poursuivre un suivi plus fréquent sur ce site afin de confirmer ces résultats sur les années à venir.
D’après les données du protocole ACROLA, les effectifs du Phragmite aquatique ont baissé de 75% entre 2007 et 2019. Entre 2007 et 2012, les effectifs et l’indice 93 sont similaires aux données d’autres stations du Grand Ouest mais baissent de façon continue à partir de 2013. Cette tendance est également observée à Donges mais seulement jusqu’en 2017. Le manque de référentiels sur ces dernières années ne permet cependant pas de déterminer s’il s’agit d’une tendance locale ou nationale. Un suivi de la qualité du milieu, et en particulier des scirpaies, serait pertinent afin de mieux comprendre localement les effectifs de l’espèce.
La diversité des passereaux paludicoles et leur effectif, l’utilisation du site par le Phragmite aquatique et l’engraissement des espèces avec une stratégie de refueling montrent l’intérêt des réserves du Massereau et du Migron en halte migratoire. De plus, les échanges locaux avec la station de Donges située à quelques kilomètres (55% des contrôles nationaux), témoignent de la complémentarité de ces sites de halte dans l’estuaire de la Loire. Toutefois, une variabilité interannuelle des paramètres étudiés est à noter. Ainsi, une période de baguage d’un mois minimum semblerait plus adaptée pour permettre un suivi à long terme et fiable des tendances d’effectifs et de phénologie des espèces.

Pour en savoir plus: 

Rédacteur: Frédéric Laigneau

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