Grand tétras marqué en parade (M. Gauthier-Clerc) |
Régulièrement des coqs de Grand Tétras au comportement inhabituel sont signalés. Leur point commun est d’être confiants vis-vis à des humains. Ils sont signalés lorsqu’ils s’approchent des activités humaines, comme des pistes de ski ou dans les villages.
Ces coqs sont parfois en parade nuptiale, et peuvent alors devenir agressifs vis-à-vis des passants, randonneurs ou skieurs. L’un d’eux dans le Haut-Jura a fait le tour des réseaux sociaux ces dernières semaines.
Le « fou » et le « mou »
Depuis des dizaines d’années, ces coqs ont été désignés par les termes « mou » et « fou » et ces termes se sont imposés à tous, mais à tort:
« Mou » quand le coq est observé en train de manger, se reposer. Le terme « mou » signifie cependant qu’il aurait une pathologie, le rendant apathique, affaibli…
« Fou » quand le coq est observé en train de parader, et parfois d’être agressif. Le terme «fou » désigne là une pathologie d’ordre psychiatrique.
Ces coqs sont également décrits comme passant de «mou » à « fou », et inversement, comme s’ils souffraient d’un trouble bipolaire. Ces descriptions et ces termes amènent ainsi à la conclusion fréquente que ces coqs sont le résultat d’une population dégénérée, malades et en déclin. Il a été aussi dit, sans élément, que ce comportement serait le résultat d’une dégradation de l’habitat.
Ces termes « fou » et « mou » ne correspondent pas à leur comportement réel et n’ont pas de réalité médicale prouvée. Ils sont une projection, une interprétation d’un comportement qui simplement n’est pas habituel pour nous.
Le point commun à tous ces coqs est qu’ils sont confiants, et non pas farouches, comme beaucoup l’attendent de tout animal sauvage.
Depuis 2015, nous menons un programme de suivi par marquage de ces individus dans le Massif du Jura, sous la responsabilité de Pierre Durlet (bagueur du Centre de Recherche sur la Biologie des Populations des Oiseaux).
Ce que l’on sait
Au sens médical vétérinaire, il n’y a aucun élément montrant qu’ils sont malades.
Les mesures de parasites, leur poids, leur comportement… ne montrent aucun signe de maladie ou de faiblesse.
Leur comportement diffère seulement par une confiance à la présence humaine.
Il s’agit en majorité de jeunes mâles, de 1 à 2 ans, donc peu expérimenté et qui explore leur environnement. Les individus en parade nuptiale et parfois agressifs ont plutôt dépassé l’âge de deux ans et peuvent garder ce comportement plusieurs années de suite.
Ce comportement s’observe partout, en Scandinavie, en Autriche ou Russie, où l’espèce reste bien répandue.
Il n’y a actuellement aucune preuve d’un dérèglement hormonal. Cela reste une hypothèse. Par contre, on sait que lors des parades pour la reproduction, les mâles de nombreuses espèces ont des taux d’hormones comme la testostérone plus élevés et sont plus agressifs.
Les parades avec de l’agressivité sur les humains sont communes et considérées comme normales au Canada chez une autre espèce de tétras. Les mâles peuvent être très territoriaux toute l’année. Les parades nuptiales observées augmentent lors de la période de reproduction, probablement en lien avec des taux d’hormones plus élevés, comme la testostérone.
Conclusion et précaution
Ces coqs sont des oiseaux au tempérament confiant et donc pas farouche dont la cause n’est pas scientifiquement identifiée. Il n’y a actuellement aucun résultat qui indiquent qu’ils aient un problème de santé.
Il ne faut plus utiliser les termes « fou » et « mou » qui désignent des animaux malades et peuvent amener à les éliminer. L’espèce est en grand danger dans le massif du Jura et il est important de ne pas les importuner en restant à distance.
Ce texte est extrait d'un communiqué de presse de la Fondation du parc zoologique La Garenne.
Rédacteur: Michel Gauthier-Clerc (Docteur vétérinaire, directeur du zoo la Garenne, chercheur associé à Chronoenvironnement – Université Bourgogne Franche Comté) et Pierre Durlet (bagueur CRBPO).
Même constat dans le Parc national des Cévennes où l'espèce est redescendue à un niveau très bas de population. Les coqs "fous" apparaissent régulièrement sur le Mont-Lozère. Ce problème affecte également les poules qui viennent se prosterner pour s'accoupler auprès des humains. Elles sont très familières, suivent les marcheurs et approchent des habitations. Cette année encore une femelle, bien connue pour ce comportement depuis trois ou quatre ans, a été signalée dans un chalet du Mont-Lozère, passant la journée avec les personnes dans la maison, et se branchant la nuit dans un arbre du jardin. Déplacée sur un site potentiel de reproduction, elle a réintégré le chalet en 48heures...distant de 12 km à vol de tétras.Curieusement ces oiseaux "familiers" semblent bien survivre à cet état vis à vis des chiens ou des humains peu scrupuleux. Nos observations concerne des animaux nés en milieu naturel.
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