Corneille noire 083 'entretenant' une pelouse. |
Depuis une trentaine d’années, le nombre de corneilles
noires a augmenté dans Paris, de manière concomitante à la modification de
gestion des poubelles publiques suite à plusieurs séries d’attentats dans la
capitale. Il a été suggéré que les corneilles trouvaient dès lors un accès plus
aisé aux restes de nourriture jetés dans ces poubelles, devenues de simples
sacs en plastique transparent. Ces corvidés se rassemblent parfois en grands
groupes dans les parcs urbains, pouvant compter jusqu’à plusieurs centaines
d’individus. Il s’agit majoritairement de rassemblements d’immatures, pouvant
alors causer des nuisances plus visibles par exemple vider les poubelles,
arracher les parterres de fleurs ou les pelouses, à la recherche de vers ou de
larves d’insectes. C’est pourquoi, depuis juillet 2015, et sous l’impulsion de
la Mairie de paris, un programme de capture et de marquage de corneilles a été
mis en place par Frédéric Jiguet (Centre d'Ecologie et des Sciences de la Conservation, programme personnel n°883) sur les
sites du Jardin des Plantes et du Jardin des Tuileries (Paris; voir post précédent). Chaque oiseau est
marqué avec deux bagues de couleur identiques portant un code individuel gravé,
qui permet à des observateurs d’identifier les oiseaux et de signaler leurs
observations sur une plateforme internet dédiée (www.corneilles-paris.fr). Plus
de 560 individus ont été bagués en 4 ans, qui ont donné lieu à plus de 10000
observations visuelles par presque 100 observateurs différents. Le but de ce
programme est d’étudier les déplacements et la survie des corneilles capturées
à Paris, afin de comprendre pourquoi les mesures de régulation locales ne sont
pas efficaces, et de trouver des méthodes pour limiter les nuisances. C'est l'objet de la thèse de doctorat de Perrine Lequitte-Charransol (CESCO): 'Cohabiter avec les corneilles : nuisances et adaptations' (financée par la Région Ile-de-France, 2020-2023).
La corneille noire ne présente pas de dimorphisme sexuel.
Or, le sexe est une variable importante à prendre en compte pour étudier la
dispersion d’une espèce. C’est pourquoi, les individus capturés de 2016 à 2021
ont été mesurés (longueur et hauteur du bec, longueur de l’aile pliée et
longueur du tarse), pour constituer une base de données morphométriques. Des
plumes ont été prélevées pour réaliser une extraction d’ADN servant à
déterminer le sexe des oiseaux. Le résultat du sexage moléculaire a été croisé
avec ces données morphométriques afin de trouver une combinaison de variables
permettant de prédire le sexe des corneilles. La fonction trouvée a permis de
prédire le sexe de 105 corneilles de première année, capturées de 2016 à 2021,
avec 88% de réussite. Cette fonction, appliquée à 542 corneilles de première
année capturées pendant la même période, a montré les femelles étaient plus
nombreuses que les mâles parmi les corneilles capturées au jardin des plantes.
Ceci pourrait indiquer que les corneilles femelles sont plus nombreuses que les
mâles au Jardin des Plantes... ou qu’elles sont plus susceptibles d’entrer dans
la cage de capture !
Pour en savoir plus, lisez l'article:
Lequitte-Charransol, P., Saux, E., & Jiguet, F. (2022). Sexing first-calendar-year Carrion Crows Corvus corone from biometrics reveals variation between years in post-fledging sex ratio. Ringing & Migration, 1–9. DOI: 10.1080/03078698.2022.2098369
Rédaction: Perrine Lequitte-Charransol