La conservation des espèces menacées par les activités humaines consiste à favoriser la reprise de la croissance des populations en limitant l’impact des différentes menaces sur la survie ou la reproduction des individus. Face à la complexité des processus écologiques et l’urgence d’agir dans un contexte de ressources financières limitées, une évaluation des bénéfices des actions mises en œuvre est nécessaire pour permettre une gestion efficace des populations menacées. L’aigle de Bonelli est un bon exemple d’espèce menacée bénéficiant depuis plusieurs décennies de mesures de gestion conservatoire. Elle fait aussi l’objet d’un programme de baguage ininterrompu depuis 1990 qui a permis de baguer environ 95% des poussins nés en France depuis cette date (Ponchon & Ravayrol 2015). Enfin, un effort très important de relecture des bagues est assuré plus particulièrement depuis 1995. L’électrocution des aigles sur les pylônes électriques a rapidement été identifiée comme une cause de déclin majeure pour l’espèce. Ceci a conduit à partir de 1997 à la mise en œuvre d’actions visant à la neutralisation des pylônes dangereux à la fois sur les territoires de reproduction connus mais aussi dans les zones d’erratisme de l’espèce. Si l’impact positif de telles mesures de neutralisation sur la dynamique des populations d’oiseaux n’avait jusqu’alors jamais été montré au niveau international, des travaux se basant sur les données du programme de CMR sur l’Aigle de Bonelli en France ont pu évaluer les bénéfices obtenus par ces actions. Un premier travail a permis de vérifier la forte diminution des taux de mortalité par électrocution et l’augmentation globale de la survie des aigles à partir de 1997 (Chevallier et al. 2015), un second travail a permis de montrer que l’augmentation observée du nombre de couples reproducteurs en France depuis les années 2000 était effectivement expliquée par cette action de conservation bien que la population d’aigles du Sud de la France soit encore soutenue par un renfort d’immigrants venus d’Espagne (Lieury et al. 2016). Ces travaux montrent l’importance des efforts de suivis individuels menés sur le long terme pour montrer les bénéfices réels des actions menées sur le terrain et tenter de les améliorer encore.
Par Nicolas Lieury, Alexandre Million, Aurélien Besnard,
Alain Ravayrol et Cécile Ponchon.
Chevallier, C., A. Hernández-Matías, J. Real, N. Vincent-Martin, A. Ravayrol, & A. Besnard. 2015. Retrofitting of power lines effectively reduces mortality byelectrocution in large birds: An example with the endangered Bonelli’s eagle. Journal of Applied Ecology 52:1465–1473.
Lieury, N., A. Besnard, C. Ponchon, A. Ravayrol, & A. Millon. 2016. Geographically isolated but demographically connected: immigration supports efficient conservation actions in the recovery of a range-margin population of the Bonelli’s eagle in France. Biological Conservation 195:272–278.
Ponchon, C. & Ravayrol, A. (2015). Rapaces diurnes - Aigle de Bonelli. 25 ans du programme de baguage: bilan et perspectives. Rapaces de France - L’Oiseau Magazine, Hors série n°17, 44–47.
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